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Marché dur: que doit faire un courtier?

Date de publication : 28 avril 2020 | Dernière mise à jour : 15 juin 2020

Marché dur, marché ferme, durcissement, resserrement. Nombreux sont les termes pour désigner la correction que subit l’industrie de l’assurance de dommages dans un marché jugé mou depuis de nombreuses années.

Au Québec, depuis 2002, on observait un marché mou où les courtiers en assurance de dommages avaient une variété de choix pour placer les risques de leurs clients. Or, depuis que les techniques de souscription se sont affinées – avec de nouveaux outils technologiques et une analyse plus approfondie des données – et que la fréquence et le coût de certains sinistres ont explosé, les assureurs se montrent plus sélectifs dans leur appréciation des risques.

En effet, Raymond Chabot Grand Thornton affirmait dans un article sur les tendances[1] que « [l]’état actuel du marché de l’assurance et de la réassurance expose davantage les entreprises à des changements de tarifications, de garanties et de conditions ». Les médias ont également exposé la situation d’entreprises ayant dû fermer leurs portes à défaut de trouver une protection d’assurance[2]. À cela s’ajoutent les nouveaux risques – dont la cybercriminalité, la technologie et l’économie de partage – auxquels les entreprises sont de plus en plus exposées.

Si certains assureurs revoient leur modèle d’affaires, les courtiers en assurance de dommages doivent se rappeler leurs obligations afin d’éviter de causer un préjudice à leurs clients.

Pourquoi le marché se raffermit-il?

Plusieurs raisons expliquent ce changement dans le marché, indique Maxime Poulin, courtier en assurance de dommages, vice-président exécutif et associé au Groupe Ostiguy & Gendron et administrateur à la ChAD : « Le manque de rentabilité chez les assureurs combiné à un cycle de baisse des taux d’intérêt depuis plus d’une dizaine d’années, qui amenuise le rendement des placements et les rendements de l’investissement, a entraîné une réduction de la capacité des assureurs d’absorber certains risques ; par conséquent, on observe une augmentation des prix. »

Autre facteur qui justifie le marché dur : le manque d’assureurs. Dans un contexte où « les dix plus importants assureurs ou groupes d’assureurs présents dans le secteur de l’assurance de dommages au Québec ont recueilli 76,1 % des 10,5 G$ de primes directes souscrites »[3], la concentration du marché contribue à réduire les options pour les courtiers. En assurance de biens des entreprises, cette concentration se situe à 75 % alors qu’en assurance automobile et en assurance de biens des particuliers, elle s’élève à 90 %.

L’assurance automobile

Le Groupement des assureurs automobiles (GAA) observe également un resserrement depuis quelques années, et ce, tant en assurance des particuliers qu’en assurance des entreprises. « Les primes ne suffisent plus à couvrir le nombre et le coût des sinistres », indique Line Crevier, responsable des affaires techniques et du Centre d’information sur les assurances, en précisant que la prime moyenne pour une voiture de tourisme a été en baisse de 2004 à 2014, alors que le coût des sinistres a été en hausse constante[4]. En effet, le ratio sinistre-prime s’établissait à 74 % en 2018 pour l’ensemble du marché de l’assurance auto, tous types de contrats confondus. « Si on ajoute les frais d’administration des compagnies d’assurance, qui se situent généralement à environ 30 %, cela signifie donc que pour chaque dollar de prime facturé en 2018, les assureurs ont déboursé 1,04 $ pour le coût des sinistres et les frais de fonctionnement », ajoute Mme Crevier.

Depuis environ trois ans, on observe un resserrement du marché qui touche particulièrement les transporteurs [5]; parmi les différentes causes ayant contribué à la détérioration du marché, mentionnons la pénurie de main-d’oeuvre, un abaissement des critères d’embauche, une formation inadéquate et les coûts élevés des réclamations en assurance responsabilité civile et en dommages corporels aux États-Unis.

Une police d’assurance auto en responsabilité civile étant obligatoire pour un minimum de 50 000 $ pour les particuliers et de 1 000 000 $ pour les transporteurs, un courtier qui ne réussit pas à trouver une assurance pour cette portion doit diriger son client vers le GAA, qui verra à ce qu’il souscrive l’assurance prescrite par la Loi sur l’assurance automobile. « Avant d’intervenir, le GAA exige que l’assuré ait fait différentes démarches au préalable ; il doit avoir communiqué avec plusieurs courtiers ou assureurs – habituellement cinq – pour tenter de trouver une assurance », précise Mme Crevier.

Le courtier ne peut donc pas effectuer ces démarches au nom de son client. Le GAA intervient ensuite directement auprès d’un assureur. Par ailleurs, le formulaire et l’application du méca­nisme sont les mêmes pour un particu­lier et une entreprise. Par contre, pour répondre aux besoins des particuliers, « le GAA a mis sur pied un mécanisme d’accès renforcé par lequel l’automo­biliste pourrait obtenir, à certaines conditions, un montant d’assurance en responsabilité civile plus élevé que celui de 50 000 $ exigé par la loi ou l’ajout de protections pour assurer le véhicule lui-même, mentionne Mme Crevier. Ce service s’appuie sur une entente que le GAA a conclue avec les assureurs automobiles. »

Quels marchés se resserrent?

Ce phénomène se ressent particuliè­rement en assurance des entreprises. Dans plusieurs marchés, M. Poulin a remarqué des augmentations de primes de 50 %, voire parfois de 100 %, ou de deux à trois fois la prime venant à échéance : « On voit un durcissement sévère du marché dans le secteur agricole, l’industrie de la transformation alimentaire, l’aviation, l’immobilier et les copropriétés, et surtout dans les centres de tri et de recyclage, où les courtiers n’ont pratiquement accès qu’à un seul assureur à Toronto. »

Par ailleurs, la situation devient de plus en plus critique en fin d’année, quand les assureurs ou les réassureurs ont atteint leur capacité et ne peuvent prendre de nouveaux risques. « Avec la hausse des franchises ou des montants de la prime, on voit de plus en plus de clients du secteur commercial qui ont la capacité financière d’assumer leurs risques ou qui peuvent s’autoassurer, ou du moins en partie, illustre M. Poulin. L’important, avec l’auto-assurance, est qu’elle soit structurée, planifiée et provisionnée. Bien qu’il soit encore rare qu’on ne puisse replacer un risque, on voit de plus en plus, sur le marché, des dossiers qui ne sont pas replacés à 100 % et où il faut recourir à une limite de perte, appelée en anglais loss limit. »

Que doit faire un courtier dans cette situation?

Habituellement, lorsque l’assureur se retire d’un risque et n’entend pas renouveler un contrat, il avise le courtier dans un délai raisonnable. Il incombe alors au courtier de trans­mettre l’information le plus rapidement possible à son client[6]. Dans une récente décision disciplinaire[7], un courtier avait omis d’informer son client que l’assureur avait refusé d’assurer ses camions de transport dont l’utilisation hors Québec dépassait 20 %, contrevenant ainsi à l’article 25 de son code de déontologie. Cet article impose au représentant d’exécuter avec transparence le mandat qu’il a accepté. Ainsi, dans le cas où un assureur se retire d’un marché, le courtier a l’obligation de « donner à son client toute l’information relative à son dossier, sans rien cacher »[8]. Il doit aussi être proactif et rendre compte des actions qu’il pose.

Dans une telle situation, si le courtier ne croit pas être en mesure de replacer le risque auprès d’un autre assureur, il doit en informer rapidement son client et lui envoyer une lettre de fin de mandat. La ChAD propose d’ailleurs des lettres types personnalisables que vous pouvez envoyer à vos clients.

Si vous croyez par contre être en mesure de replacer le risque, vous devez tout de même communiquer aussitôt avec votre client en lui précisant votre intention et en expliquant les démarches que vous entendez entre­prendre et les conséquences possibles, telles qu’une augmentation de la prime ou des franchises, des changements dans les protections ou le recours à de multiples assureurs pour assumer les risques. « Le courtier doit discuter en amont de la probabilité qu’il ne trouve pas d’autres marchés et des actions que devra alors entreprendre rapidement son client, précise Yves Barrette, courtier en assurance de dommages et enquêteur au Bureau du syndic de la ChAD. Il a également intérêt à rendre des comptes de façon ponctuelle afin de tenir son client au courant de ses démarches, pour ainsi éviter de lui causer un préjudice. »[9]

Si, malgré tout, vos efforts sont vains, vous devez à ce moment transmettre une lettre de fin de mandat à l’assuré. « Le courtier devrait aussi indiquer à l’assuré quels sont les assureurs approchés n’ayant pas accepté le risque, ajoute M. Barrette. Il peut appeler son client ou inscrire l’information dans sa lettre de fin de mandat, à sa guise. Cela aidera l’assuré ou le nouveau courtier qu’il mandatera à gagner du temps dans ses démarches auprès d’autres assureurs. »

Qu’arrive-t-il si le contrat vient à échéance avant que le courtier ne puisse mener ses démarches à terme auprès d’autres assureurs ? « Il arrive de plus en plus fréquemment que l’on doive demander une extension de la période de couverture à l’assureur, indique M. Poulin. L’extension se fait habituellement aux mêmes conditions, mais l’assureur n’a aucune obligation en ce sens. » Dans ce cas, il faut avoir informé au préalable son client des options qui s’offrent à lui afin d’éviter qu’il se retrouve sans protection. 

En résumé, le courtier doit s’assurer qu’il a pris tous les moyens nécessaires pour ne pas causer de préjudice à son client, notamment pour éviter que celui-ci se retrouve sans assurance, et veiller à ce qu’il bénéficie d’un délai satisfaisant afin de souscrire un nouveau contrat d’assurance. Assurez-vous que votre client comprend la situation et qu’il est informé des conséquences qui découlent de la fin de mandat, notamment le fait qu’il doit entreprendre, sans délai, des démarches pour se procurer une nouvelle protection d’assurance.

La ChAD met à la disposition des représentants plusieurs lettres types de fin de mandat à personnaliser. Consultez la procédure de fin de mandat pour savoir comment mettre fin à un mandat dans le respect de vos obligations déontologiques et légales. À titre d’exemple, la lettre doit être adressée à tous les assurés désignés au contrat et indiquer les risques pour lesquels le courtier cesse d’agir, s’il y en a plusieurs.

Tout noter au dossier

Il importe de tout noter au dossier afin de bien documenter l’information transmise au client, l’évolution du dossier et les décisions prises de part et d’autre, et ce, tout au long des démarches.

 

 

[1] JULIEN, Simon, « Marché de l’assurance de dommages en 2018 : tendances et prévisions », Raymond Chabot Grant Thornton, 20 février 2018.

[2] LÉVEILLÉ, Jean-Thomas, « Le centre de tri de Longueuil met la clé sous la porte », lapresse.ca, 26 novembre 2019 ; LA PRESSE CANADIENNE, « Air Saguenay met fin à ses activités », lapresse.ca, 27 novembre 2019.

[3] AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS, Rapport annuel sur les institutions financières 2018.

[4] GROUPEMENT DES ASSUREURS AUTOMOBILES, « Statistiques collision », de 2008 à 2018

[5] MONTMINY, Justine, « Assurance camionnage : il est ardu d’assurer un transporteur allant aux États-Unis », Journal de l’assurance, 20 juin 2018.

[6] Articles 26 et 37(4o) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages.

[7] Chambre de l’assurance de dommages c. Sébastien Verret, 2018-12-04(C).

[8] Article 25 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages commenté

[9] Article 37(4o) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages