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Les clés de l’avenir de l’assurance

Date de publication : 1 juin 2018 | Dernière mise à jour : 19 avril 2020

Comme plusieurs autres industries, l’assurance de dommages doit composer avec de nombreux changements : révolution numérique, habitudes et comportements de consommation et de communication en mutation, révision du cadre réglementaire et législatif.

Pour prospérer dans ce contexte, les professionnels devront réinventer leur modèle d’affaires. S’ils veulent attirer les jeunes générations, ils auront notamment à contrer l’image vieillotte dont souffre le secteur de l’assurance de dommages, perçu comme étant complexe, rigide et lent. L’industrie devra-t-elle compter seulement sur les nouvelles technologies pour se démarquer? En réalité, elle devra trouver un moyen de démontrer sa valeur ajoutée et s’inspirer de ce qui se fait ailleurs pour innover et avancer. Voilà les constats dégagés lors de la Journée de l’assurance de dommages 2018. Petit survol.

Les nouvelles générations changent la donne

Ce n’est un secret pour personne : la génération des 18 à 34 ans est plus technophile que celles qui l’ont précédée. Ces consommateurs sont nés en même temps que la plupart des technologies qui nous entourent aujourd’hui, et ils en sont des utilisateurs naturels – après tout, ne les a-t-on pas surnommés les natifs numériques? Cette aisance innée se voit dans leurs façons de communiquer et de consommer. Ainsi, en 2016, les messages textes et les téléphones portables représentaient les moyens de communication principaux de sept Québécois de 18 à 34 ans sur dix1. Selon une étude encore plus récente, 35 % des consommateurs québécois âgés de 18 à 34 ans se disent même prêts à se procurer de l’assurance entièrement par Internet, de la soumission au paiement2.

Cette évolution numérique influence aussi le milieu de travail : 87 % des entreprises en assurance de dommages confirment que l’évolution des technologies influence les compétences qu’elles recherchent chez leurs candidats, a révélé Johanne Lamanque, présidente du conseil d’administration de la Coalition pour la promotion des professions en assurance de dommages, lors de la conférence L’avenir de l’industrie passe par les jeunes milléniaux.

MmeLamanque a révélé que d’ici 2024, les Québécois de 18 à 34 ans représenteront 56 % de l’offre de main-d’œuvre. Pour les attirer comme consommateurs et comme professionnels, il faudra contrer l’image archaïque que les représentants de cette génération entretiennent de l’industrie et leur démontrer les bénéfices d’y travailler. Ces nouvelles générations de travailleurs ne se démarquent pas de leurs prédécesseurs que par leur maîtrise des technologies. Leurs attentes à l’égard du milieu professionnel et leurs valeurs sont également différentes, a expliqué l’auteur et conférencier Stéphane Simard lors de la même conférence. Selon lui, le travail est pour eux un moyen de se réaliser plutôt qu’une fin en soi; ils doivent donc pouvoir donner un sens à ce qu’ils font. Ils apprécient aussi particulièrement le partage d’information, la communication informelle et l’autonomie. Selon la Banque de développement du Canada, ils favorisent la conciliation de leur vie personnelle et de leur vie professionnelle, valorisent les entreprises qui partagent leurs valeurs, font preuve de transparence et d’honnêteté et se montrent dignes de confiance.

Améliorer l’expérience client : l’exemple du règlement d’un sinistre

L’amélioration de l’expérience client est donc un levier important pour atteindre les nouvelles générations. Pour plusieurs compagnies d’assurance, les technologies sont des leviers de progrès, qu’il s’agisse de communication, de prévention des risques ou de simplification des processus.

Le consultant indépendant et vulgarisateur du domaine numérique Bruno Guglielminetti croit lui aussi que l’amélioration de la perception de l’industrie passera par des outils numériques mis à la disposition des consommateurs pour les rendre maîtres de leur expérience. Après tout, selon lui, « les milléniaux ont appris à être autonomes depuis toujours et, lorsqu’il est question de leur assurance auto ou habitation, ils doivent se plier à une vieille façon de faire. L’écart est grand avec l’industrie, et celui qui tirera son épingle du jeu sera sans doute celui qui offrira les outils permettant de répondre à ce besoin d’autonomie ». Il est donc important de regarder les processus avec un œil de consommateur.

Selon les panélistes de la conférence La gestion de l’indemnisation : une étape cruciale pour la satisfaction de la clientèle, environ 15 % des Québécois subissent un sinistre chaque année. Pourtant, une seule personne insatisfaite fera plus de bruit que l’ensemble des autres qui n’ont rien à redire. « Chaque réclamation est une pelure de banane », a illustré Michel Laurin, président et chef de l’exploitation d’iA Assurance auto et habitation. Or, « si 65 % des consommateurs ont confiance en nous, 43 % d’entre eux trouvent également le processus de réclamation lent et compliqué 3», a souligné Bernard Deschamps, président-directeur général de la Mutuelle des municipalités du Québec.

Les joueurs émergents, tels que les assurtechs, capitalisent d’ailleurs sur les irritants reprochés à l’industrie pour offrir un service où les outils numériques en pallient les faiblesses, qu’elles soient réelles ou perçues. Un processus de réclamation trop long? Pourquoi ne pas traiter avec Jim, le robot de l’entreprise en démarrage américaine Lemonade, qui est réputé avoir réglé la réclamation la plus rapide de l’histoire en trois secondes à peine. Il faut avouer que ce serait un argument de poids pour les consommateurs qui se plaignent de la lenteur des processus actuels au Québec.

Redéfinir le rôle des professionnels

Si la révolution technologique est incontournable, les professionnels ont toutefois un important rôle à jouer, et ce, même si on envisage d’autoriser la vente en ligne. C’est ce qu’a rappelé Christopher Johnson, président du conseil du Regroupement des cabinets de courtage d’assurance du Québec, lors du panel de clôture intitulé La vente d’assurance réinventée : les canaux de distribution se multiplient et les statuts des intermédiaires changent! Quel sera leur rôle en 2018?.

Les consommateurs ne sont d’ailleurs pas tous prêts à s’en passer : près d’un sur six préfère encore souscrire son assurance auto ou habitation auprès d’un professionnel4. Pour créer de la valeur auprès des consommateurs qui ne magasinent pas sur Internet, et qui sont tout de même la majorité dans l’industrie, il faudra différencier l’acte de vente de celui de conseil. Bernard Laporte, président-directeur général d’Intergroupe Assurances, croit que le meilleur comparateur restera le professionnel, qui ne se contente pas de comparer des primes, mais qui agit également comme conseiller. C’est pourquoi « les nouvelles technologies doivent être en soutien au conseil dans la prestation d’assurance. Peu importe les moyens technologiques, il faudra toujours mettre de l’avant l’expérience client dans la vente de produits d’assurance en ligne », a rappelé Eric Stevenson, avocat associé chez Lavery, lors de la Journée de l’assurance de dommages.

Créer de la valeur en ligne

Il va de soi qu’Internet est déjà une source d’information précieuse pour les consommateurs. En effet, 61 % des assurés effectuent des recherches en ligne avant de souscrire un produit d’assurance de dommages5. Par contre, 74 % des Québécois ne seraient pas à l’aise d’acheter un contrat d’assurance en ligne sans l’intervention d’un représentant, principalement parce qu’ils jugent les produits trop complexes, qu’ils ont peur d’être mal assurés ou qu’ils craignent d’avoir des difficultés en cas de sinistre. Lors de la Journée de l’assurance de dommages, le Journal de l’assurance a publié une étude du CEFRIO qui abondait dans ce sens : 27 % des répondants souhaitent faire l’achat d’une police d’assurance uniquement en ligne alors que 70 % des répondants ont répondu qu’ils préfèrent plutôt « parler de vive voix à quelqu’un » que de recevoir une soumission par Internet, pouvait-on notamment y lire.

Puisqu’Internet représente une réelle valeur ajoutée que l’industrie exploitera davantage dans l’avenir, l’encadrement de ce canal de distribution dans le projet de loi 141 est accueilli favorablement. À l’occasion de la conférence Le projet de loi 141 et le rôle du courtier et de l’agent, Maya Raic, présidente-directrice générale de la ChAD, Me Patrice Deslauriers, professeur titulaire de la Faculté de droit de l’Université de Montréal, et Me Annik Bélanger-Krams, analyste chez Option consommateurs, ont toutefois soulevé quelques failles potentielles pour la protection du public. « Au bout du compte, peu importe le canal choisi pour souscrire un produit d’assurance, le consommateur doit bénéficier des mêmes droits, des mêmes protections, des mêmes recours », a résumé Maya Raic.

La déclaration des risques par les consommateurs par Internet préoccupe Me Deslauriers. En vertu du Code civil du Québec6, les assurés doivent déclarer toutes les circonstances connues qui pourraient influencer leurs risques et, de ce fait, la décision d’un assureur d’assumer leur couverture. « Il s’agit d’une responsabilité lourde de conséquences pour un consommateur souvent profane en la matière, puisque cette obligation s’étend au-delà des questions que lui pose l’assureur, précise-t-il. On peut légitimement se demander si l’utilisation d’Internet n’amplifiera pas ces interprétations législatives fondées sur la notion de la plus haute bonne foi. » Me Deslauriers craint que si le client doive remplir un questionnaire en ligne sans l’assistance d’un représentant, il pourrait estimer que de répondre aux questions constitue une déclaration complète et adéquate. Le cas échéant, la vulnérabilité des consommateurs serait malheureusement accrue.

Me Bélanger-Krams s’est aussi inquiétée, d’une part, qu’on n’allège pas les obligations des consommateurs dans la déclaration du risque mais, d’autre part, qu’on diminue les obligations de conseil des professionnels, lesquels pourraient être écartés de la vente d’assurance en ligne. « Une combinaison alarmante pour la protection du public », a-t-elle insisté. Elle croit par ailleurs fermement que la souscription hybride – impliquant le conseil d’un représentant certifié – est à privilégier : « Celle-ci permet au consommateur de remplir un formulaire en ligne, mais oblige que ce dernier soit révisé par un professionnel qui s’assure que les renseignements sont adéquats et que le produit répond réellement aux besoins. »

Me Bélanger-Krams a aussi joint sa voix à celle Me Deslauriers en suggérant de s’inspirer du modèle du questionnaire limitatif instauré en France, où la déclaration du risque se fait sur la seule base d’un questionnaire précis et fermé. Ainsi, un assureur ne peut refuser d’indemniser un client par le fait que ce dernier n’aurait pas déclaré un certain risque.

Enfin, Maya Raic a rappelé que les technologies – dont l’utilisation d’Internet – sont des outils qui peuvent non seulement aider le professionnel dans sa relation avec le client, mais aussi, en allégeant ses tâches administratives, lui permettre de se recentrer sur des tâches à plus forte valeur ajoutée, axée sur l’écoute et le conseil. « Bref, les technologies devraient accompagner le professionnel, et non pas le remplacer. Le consommateur et l’industrie gagneraient à adopter une stratégie “phygital” (une contraction des mots anglais physical et digital), où l’on combine les compétences et les obligations du professionnel certifié, qui reste imputable de ses gestes, avec les avantages de la technologie », a-t-elle conclu.

 

Collaborer pour innover et créer de la valeur

L’assurance de dommages n’est pas le seul secteur à subir les turbulences de l’arrivée de nouvelles générations, fortement technophiles, qui s’attendent à un service simple, rapide, à toute heure du jour ou de la nuit, et ce, dans le confort de leur foyer.

Pour affronter l’avenir et se réinventer, l’assurance de dommages peut d’ores et déjà s’inspirer de ce qui se fait dans les autres industries et commencer à collaborer davantage. Travailler avec des spécialistes, oui, mais pas exclusivement. Selon Réal Jacob, professeur titulaire du Département d’entrepreneuriat et innovation de HEC Montréal, « l’innovation est une conception de plus en plus ouverte et collaborative qui s’éloigne de la R et D et des experts ». Les entreprises doivent s’ouvrir à leurs clients et à leurs concurrents, sortir de leurs frontières naturelles et travailler en communautés d’innovation, a-t-il martelé lors de la conférence d’ouverture Comment l’industrie continuera à créer de la valeur pour ses clients?.

« Vous avez d’ailleurs un bel exemple de cocréation par la collaboration dans votre industrie : une association [la Coalition pour la promotion des professions en assurance de dommages] créée par plusieurs joueurs de l’industrie [à l’initiative la ChAD], pour régler le problème de relève et de recrutement auquel plusieurs d’entre vous font face », a-t-il également remarqué. Citant d’autres exemples de « coopétition », où des concurrents collaborent et s’associent pour servir un intérêt supérieur commun, M. Jacob a mentionné l’association entre l’Université McGill et HEC Montréal pour créer un MBA exécutif (EMBA) aujourd’hui reconnu mondialement.

Il invite l’industrie, qui possède certainement les connaissances, à ouvrir ses portes à une communauté de création dont les membres ne sont pas issus du monde de l’assurance de dommages pour découvrir les solutions innovantes que cela pourrait engendrer. En 2014, le Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine de Montréal a ainsi ouvert ses portes à plus de 600 personnes d’horizons divers pour créer des solutions numériques visant à améliorer la santé. Plus récemment, le Vatican a organisé un marathon collaboratif de 36 heures invitant programmeurs, spécialistes du marketing, graphistes, grandes universités et entreprises du Web à élaborer des projets d’inclusion sociale et de solidarité.

La collaboration requiert toutefois un investissement de temps et d’argent; pour réussir, elle doit s’inscrire dans le plan d’affaires et la stratégie des entreprises. Au-delà du simple renouvellement des processus d’affaires, l’innovation doit être guidée par la volonté de créer du sens pour les clients. « Plus on vit dans un univers d’objets connectés, plus on doit revenir à notre raison d’être pour être en mesure d’augmenter la valeur pour le client et que cette valeur soit engageante et significative pour lui », a indiqué M. Jacob. Il a finalement rappelé que « pour collaborer, il faut de la confiance, de la cohérence et du courage ». Le proverbe africain Tout seul, on va plus vite, ensemble, on va plus loin semble plus que jamais vouloir prendre tout son sens.

 

1. CEFRIO, Fiche génération Y (18 à 34 ans).

2. CEFRIO, Assurance de dommages à l’ère du numérique, p. 32.

3. Les données citées par M. Deschamps proviennent du sondage Perception des Québécois à l’égard de l’industrie de l’assurance de dommages réalisé par Léger pour le compte de la ChAD en 2016.

4. Sondage Perception des Québécois à l’égard de l’industrie de l’assurance de dommages réalisé par Léger pour le compte de la ChAD en 2016.

5. Sondage Perception des Québécois à l’égard de l’industrie de l’assurance de dommages réalisé par Léger pour le compte de la ChAD en 2016.

6. Articles 2408 et 2409 du Code civil du Québec.