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Vol ou fraude: un impact différent sur le droit à l’indemnisation en vertu d’une police d’assurance

Date de publication : 1 mars 2018 | Dernière mise à jour : 18 avril 2020

La Cour d’appel, dans l’arrêt 6916643 Canada inc. c. Intact, compagnie d’assurances1, réaffirme, en 2017, l’état du droit concernant l’application d’une police d’assurance dans le contexte d’une fraude.

Les faits

En octobre 2013, la compagnie Toiles Ste-Monique (« Toiles ») convient de vendre plusieurs abris temporaires à un individu avec lequel elle n’a jamais fait affaire, M. Denis St-Pierre. Ce dernier s’engage à envoyer un livreur chercher la commande une fois que celle-ci sera prête et à remettre un chèque certifié en échange. Le jour dit, un certain M. Guzman se présente en début de soirée afin de prendre livraison de la marchandise. Il remet en contrepartie un chèque certifié au nom de M. St-Pierre. Ce chèque se révèle être faux.

À la suite de cet incident, Toiles introduit une demande en justice à l’encontre de M. Guzman pour marchandises vendues, livrées, mais impayées. Elle poursuit également Intact compagnie d’assurances (« Intact »), son assureur au moment des faits, réclamant d’être indemnisée pour sa perte.

Le jugement de première instance

Le jugement de première instance2 a été rendu au mois de mars 2017. À la date de l’audience, en janvier 2017, Toiles n’avait pu recouvrer ni sa marchandise ni sa valeur.

La responsabilité du premier défendeur est rapidement écartée. Le tribunal considère en effet que Toiles n’a pas rempli son fardeau de prouver que M. Guzman est celui qui a acquis la marchandise. Soulevant l’absence de lien de droit, il rejette ce chef d’action.

En ce qui concerne le chef de réclamation à l’encontre d’Intact, le tribunal doit déterminer si la perte subie par Toiles est couverte par la police d’assurance souscrite. Toiles allègue bien entendu que cette perte est visée par la police d’assurance et qu’Intact doit l’indemniser du montant perdu. Elle prétend avoir subi un vol, lequel comprendrait la notion de fraude. Intact, quant à elle, nie couverture, alléguant que son assurée s’est départie volontairement de sa marchandise.

Le contrat d’assurance souscrit par Toiles porte, entre autres, sur les marchandises rattachables à ses activités professionnelles, lesquelles se trouvent à des emplacements déterminés. Sous réserve des exceptions, il couvre « tous les risques pouvant directement atteindre les biens assurés ». Le contrat ne comportant pas de définitions des notions de vol et de fraude, le tribunal s’en remet à celles contenues au Code criminel, respectivement à ses articles 322 et 380. Ce faisant, il en conclut que la différence entre les deux infractions réside notamment dans la volonté de la victime de se départir du bien en cause.

En l’espèce, en contrepartie d’un chèque sans provision, Toiles s’est départie volontairement de sa marchandise. Selon le tribunal, la compagnie a donc subi une fraude, et non un vol. Dans ce contexte, la perte subie par Toiles n’est pas la marchandise en soi, mais bien sa valeur impayée. Or, l’analyse de la police d’assurance démontre que la perte d’un montant d’argent n’est pas un risque qui atteint directement les biens assurés, les espèces en étant spécifiquement exclues.

Le tribunal discute ensuite des décisions jurisprudentielles soumises par les parties. Il écarte les décisions dans lesquelles la partie requérante a subi un vol, celles qui traitent de polices d’assurance aux clauses substantiellement différentes et celles dont il n’est pas en accord avec la qualification de vol. S’appuyant sur l’arrêt Commerce & Industry de la Cour d’appel (voir ci-dessous), il rejette également le pourvoi à l’encontre d’Intact.

Le jugement de la Cour d’appel

Repoussant l’argument selon lequel il existerait une controverse jurisprudentielle concernant la question du droit à être indemnisé par son assureur à la suite d’une fraude, la Cour d’appel a rejeté la requête pour permission d’appeler du jugement de première instance soumise par Toiles. La Cour perçoit l’arrêt Commerce & Industry comme décisif. Elle considère que le juge de première instance a eu raison de suivre cet arrêt et affirme que l’état du droit est celui qui y est énoncé.

L’importance de bien analyser les clauses du contrat

En conclusion, bien que le vol et la fraude puissent être perçus comme deux infractions semblables en raison de leurs conséquences, leur indemnisation par un assureur peut différer de façon substantielle. Cela résulte notamment du fait qu’en cas de fraude, l’objet de la perte n’est pas la marchandise elle-même – comme il le serait dans le cadre d’un vol –, mais bien sa valeur impayée. Dans ce contexte, une analyse approfondie des clauses de la police d’assurance souscrite s’impose afin de déterminer si la perte subie par l’assuré est couverte et si elle doit être indemnisée.

 

La décision Commerce & Industry3 de la Cour d’appel

Dans cet arrêt aux faits similaires, une compagnie avait livré de la marchandise en échange d’un chèque visé qui s’était révélé faux. Sommée d’indemniser son assurée, la compagnie d’assurance avait refusé en alléguant que la perte subie n’était pas couverte par la police d’assurance souscrite.

La décision de première instance donnant raison à l’assurée avait été infirmée par la Cour d’appel, cette dernière jugeant que la perte financière n’était pas protégée par la police d’assurance. Celle-ci couvrait « all risks of direct physical loss or damage » et protégeait la compagnie en cas de dommage physique causé à des biens se trouvant à un endroit précis. Or, en l’espèce, comme dans notre décision, la compagnie avait librement consenti à remettre la marchandise à l’acheteur et n’avait pas été victime d’un vol. Dans ce contexte, elle n’avait pas subi de « direct physical loss or damage ». La perte subie consistait en la valeur de la marchandise impayée et n’était donc pas couverte par la police d’assurance.

 

1. 6916643 Canada inc. c. Intact, compagnie d’assurances, 2017 QCCA 660.
2. 6916643 Canada inc. c. Santos Guzman, 2017 QCCQ 4242.
3. Commerce & Industry Insurance company of Canada c. Giovanni Management Ltd, AZ-85011108 (C.A.).

 

Article rédigé par Me Chloé Goutal, avocate chez Gilbert Simard Tremblay S.E.N.C.R.L.