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L’imbroglio des règlements municipaux

Date de publication : 1 septembre 2016 | Dernière mise à jour : 17 avril 2020

​​​L’histoire

Un duplex construit au début des années 1950 est gravement endommagé par l’incendie du garage de réparations automobiles situé à côté. Le propriétaire du garage est également propriétaire du duplex et en habite le rez-de-chaussée avec sa famille, tandis qu’il loue le logement qui se trouve à l’étage. Pour assurer son duplex et son garage, le propriétaire a fait appel à deux assureurs différents.

Lors de l’enquête, on découvre que la municipalité avait adopté un nouveau règlement d’urbanisme en 2003. Or, en vertu des normes municipales en vigueur, le duplex devrait être construit un mètre plus loin par rapport à la limite de la propriété (terrain). L’incendie ayant causé 60 % de pertes au duplex, les droits acquis sont perdus. Par conséquent, le duplex devra être entièrement démoli pour être rebâti selon les normes en vigueur. L’assureur du duplex apprend au propriétaire qu’il l’indemnisera pour les dommages causés par le sinistre. Cependant, comme celui-ci n’a pas souscrit l’avenant relatif aux dispositions légales, il devra assumer une partie des coûts de démolition et de reconstruction.

Par ailleurs, le règlement de zonage ayant également été modifié en 2003, le garage ne peut, pour sa part, être reconstruit au même endroit, et un système de gicleurs particulier est requis dans la nouvelle bâtisse. L’assureur du garage, en vertu de l’avenant sur les conséquences des dispositions légales ajouté au contrat, assumera la totalité des dommages causés par le sinistre, ainsi que la relocalisation et la reconstruction du commerce selon les nouvelles normes. Pour le propriétaire, c’est à n’y rien comprendre.

Les dispositions légales

La clause sur les dispositions légales contenue dans les contrats d’assurance habitation exclut « les conséquences directes ou indirectes de dispositions légales visant soit le zonage, soit la démolition, la réparation ou la construction d’immeubles et s’opposant à la remise en état à l’identique1 ». Jean-François Morin, courtier en assurance de dommages et vice-président de Courtika, rappelle qu’il existe un avenant2 qui contre les effets de cette exclusion et qui vise trois situations, soit « la perte occasionnée par la démolition de la partie épargnée du bâtiment, les frais de démolition et d’enlèvement des débris de la partie non endommagée ainsi que l’augmentation des frais de réparation, de remplacement ou de reconstruction ». Marie-Annik Lamarche, expert en sinistre, directrice principale, assurance spécialisée et normes et règles chez Intact Assurance, ajoute qu’en assurance des entreprises, cette exclusion peut également être couverte par un avenant.

Selon M. Morin, « le sujet des dispositions légales est complexe. Il est peu connu, mais on doit faire de la sensibilisation à ce propos, car les règlements municipaux peuvent avoir d’importantes conséquences pour les assurés ». En effet, la majorité des municipalités ont adopté des règlements qui peuvent s’appliquer lors de la reconstruction de certains bâtiments, quand ceux-ci subissent des dommages dont le seuil varie d’une municipalité à l’autre. Or, selon Marc-André Langevin, ingénieur, président de Technorm et formateur, le problème, c’est l’absence d’harmonisation entre les villes : « Par exemple, la Ville de Laval a adopté, dans ses normes municipales, une clause pour la construction des petits bâtiments fondée sur l’édition 1995 du Code national du bâtiment, indique-t-il. Par contre, à Drummondville, c’est l’édition de 2010 qui s’applique alors qu’à Montréal, c’est celle de 2005. Situation encore plus paradoxale, certaines villes ne s’appuient sur aucun code en particulier, comme à Saint-Hyacinthe, ce qui, sur le plan légal, laisse aux architectes et aux ingénieurs le “choix” du code à suivre, compte tenu de l’absence de cadre réglementaire. »

De multiples conséquences

M. Langevin poursuit : « Au Québec, la construction est encadrée par un système réglementaire complexe. Il existe la Loi sur le bâtiment et le Code de construction du Québec qui en découle, mais ils ne s’appliquent pas à tous les immeubles. » En effet, on retrouve beaucoup d’exclusions en matière de construction ou de rénovation. « À titre d’exemple, les bâtiments industriels ne sont pas concernés par la loi, de même que les bâtiments résidentiels de trois étages ou moins ou ceux comprenant au plus huit logements, peu importe le nombre d’étages », précise M. Langevin.

Ainsi, on doit analyser la situation en tenant compte de la nature de la perte et du type de bâtiment ainsi que de la réglementation applicable. « La clause liée à la perte de droits acquis diffère d’une ville à l’autre, indique M. Langevin. Elle peut être basée sur une perte de valeur de 40 %, 50 % ou 60 %. Parfois, nous voyons même des clauses basées sur 70 % de perte de valeur, mais si la reconstruction a lieu dans les six mois qui suivent le sinistre, la mise aux normes n’est pas applicable ou elle l’est seulement en partie. » Il ajoute que « certaines villes se fondent, pour leurs calculs, sur la valeur “de reconstruction”, d’autres sur la valeur “dépréciée” ou encore, pour plusieurs, sur la valeur “mise aux rôles d’évaluation” ».

D’un côté, « les professionnels de la construction sont tenus de connaître la réglementation propre à chaque municipalité en plus des divers règlements provinciaux, car s’ils ne respectent pas les exigences en vigueur, cela peut aboutir à un vice de construction-conception et à un litige entre les parties », rappelle M. Langevin. De l’autre, le devoir de conseil qui incombe au professionnel en assurance de dommages exige qu’il donne à l’assuré toutes les informations pertinentes à une prise de décision éclairée. Il se trouve alors fort probablement confronté à un client mécontent qui ne comprend pas l’escalade des coûts et des imprévus associée à la reconstruction de son bâtiment.

Des pistes de solution

Lors de la soumission, « il est d’abord recommandé de demander au client s’il existe un règlement municipal modifiant les exigences ou les normes de zonage, de démolition, de réparation ou de construction pouvant s’appliquer à sa situation », explique M. Morin. Il y a cependant de fortes chances qu’il l’ignore. Dans un monde idéal, le représentant peut conseiller à l’assuré de se rendre au bureau municipal muni de son numéro de cadastre pour se renseigner. « Si on l’informe qu’aucun règlement n’est en vigueur, il est important que l’assuré obtienne une confirmation par écrit », ajoute M. Morin. À l’inverse, s’il existe un règlement, l’assuré en demandera une copie qu’il pourra transmettre à son représentant. On constate toutefois que c’est difficilement applicable en réalité, d’autant plus que les règlements municipaux changent souvent.

Une fois informé, le représentant devra ensuite aviser l’assureur, qui peut refuser de couvrir le risque. « Il faut continuer nos recherches pour réussir à placer le risque, quitte à se tourner vers le marché sousstandard », précise M. Morin. Non seulement ce ne sont pas tous les assureurs qui offrent un avenant couvrant les dispositions légales, mais chaque cas doit être analysé, compte tenu des écarts entre les municipalités. « Ces garanties comprennent des limitations et, pour bien déterminer les montants d’assurance, l’assuré devra s’informer des coûts de reconstruction de son bâtiment », ajoute Mme Lamarche, notamment en demandant une évaluation professionnelle.

Pour se prévaloir de la protection contre les conséquences des dispositions légales, l’assuré devra payer une surprime. « Certains préféreront assumer les risques », affirme Mme Lamarche. Cependant si l’assuré refuse la surprime, « il est fort possible que l’assureur refuse quant à lui d’assurer le risque. Certains assureurs exigent une confirmation écrite de l’assuré stipulant qu’il a été informé de l’exclusion et qu’il en comprend l’application ». M. Morin ajoute qu’il est toutefois important de rappeler au client qu’en cas de sinistre, le fait d’avoir opté pour une surprime lui évitera d’avoir à absorber une partie de la perte.

En cas de sinistre

« Quand survient un sinistre majeur, si l’expert en sinistre découvre l’existence de dispositions particulières concernant la reconstruction, il se renseignera alors auprès de la municipalité pour obtenir des informations sur la réglementation en vigueur », explique Mme Lamarche. Si l’assuré a souscrit l’avenant couvrant les dispositions légales, il faut en effet connaître les normes applicables lors de la reconstruction. Dans les cas plus complexes, il peut être nécessaire de faire appel à un ingénieur spécialisé dans la mise aux normes afin qu’il mène une analyse complète de la situation et confirme si le pourcentage de pertes et le type de bâtiment rendent les dispositions légales applicables.

En revanche, en l’absence d’avenant, il faudra peut-être prévoir des retards dans la reconstruction du bâtiment et gérer le mécontentement du client. « Si l’assuré n’a pas les fonds nécessaires pour reconstruire, il est important de lui expliquer les conséquences, conclut Mme Lamarche. Par exemple, en assurance des entreprises, si l’assuré avait souscrit une protection contre l’interruption des affaires, on doit lui rappeler qu’il ne sera probablement pas indemnisé pour les retards causés par des dispositions légales non couvertes. »

Publié originalement dans la ChADPresse automne 2016

1. Comme le stipule le formulaire BAC 1503Q.
2. BAC 1552Q.